Dieselgate : la longue descente aux enfers d’Audi

Publié le 27 juin 2018 à 09h00 | Fabrice SPATH | 3 minutes

Accusée d’être la tête pensante du groupe Volkswagen dans le scandale des moteurs diesel truqués, Audi a vu son patron Rupert Stadler être placé en détention provisoire

ANALYSE – Accusée d’être la tête pensante du groupe Volkswagen dans le scandale des moteurs diesel truqués, la firme d’Ingolstadt vient de repousser de deux semaines la présentation officielle de son premier véhicule électrique. Emprisonné le 19 juin, son patron Rupert Stadler reste en détention.


Septembre 2015 : en plein salon de Francfort, le groupe Volkswagen est secoué par le scandale des moteurs diesel truqués. Humilié à domicile, le plus gros groupe automobile de la planète venait pourtant de présenter deux concepts électriques – l’Audi e-tron Quattro et la Porsche Mission E – appelés à devenir les nouveaux vaisseaux amiraux d’Ingolstadt et de Zuffenhausen. Lourdement condamné aux États-Unis pour avoir installé un logiciel permettant de duper les tests sur bancs à rouleaux, le groupe tente depuis de se racheter une conduite, notamment via ses investissements dans la voiture électrique.

 

Le patron placé en détention provisoire

En Allemagne, la justice semble pourtant avoir perdu patience et, face au risque de subordination de témoin et de destruction de preuves relevant de son enquête sur l’implication d’Audi dans le scandale, a décidé de placer en détention provisoire son patron Rupert Stadler. Un fait unique dans l’histoire industrielle du pays à la hauteur de l’exaspération des procureurs. Accusé d’être la tête pensante du groupe VW dans le développement des logiciels truqueurs, le constructeur bavarois a semble-t-il diffusé son outil auprès des autres marques au travers des banques d’organes et des plateformes communes.

Interrogé par le quotidien Le Monde, un cadre du groupe confie que l’ensemble des équipes a été « surpris par la sévérité du magistrat. L’ambiance à Ingolstadt est désastreuse. Beaucoup se demandent pourquoi il a fallu en arriver là pour que les choses bougent enfin. Soit il savait, et on se demande ce qu’il fait encore là, soit il ne savait pas, et il n’avait pas le contrôle sur son groupe. »

 

Un objectif de 800 000 électriques et hybrides

Ancien protégé du patriarche Ferdinand Piëch et successeur de Martin Winterkorn à la tête d’Audi en 2007, Rupert Stadler a toujours refusé de commenter les révélations impliquant le constructeur dans le scandale du Dieselgate, rejetant toutes les accusations. Une attitude légitimée jusqu’il y a peu par la croissance du chiffre d’affaires – de 34 à 60 milliards en 10 ans – et surtout les bénéfices tirés par le dynamisme des ventes en Chine. Mais un appel téléphonique surpris par la police judiciaire concernant la suspension d’un ingénieur en charge de faire la lumière sur l’ampleur des manipulations a conduit le dirigeant en prison.

Si Audi évoque la présomption d’innocence et n’a nommé qu’un PDG « par intérim », il n’en reste pas moins que ses lancements produits en sont affectés. A commencer par la présentation officielle du SUV électrique Audi e-tron Quattro. Attendue à Bruxelles les 30 et 31 août à proximité de son site de production, celle-ci ne devrait finalement intervenir qu’à la mi-septembre, la firme aux anneaux entrelacés évoquant des « problèmes d’organisation ». Ambitieux dans le domaine, le constructeur table sur la vente de 800 000 véhicules électriques et hybrides rechargeables d’ici 2025. Un plan qui, pour l’instant, n’a pas été suivi par une quelconque opération de transparence.

Fabrice SPATH

Cofondateur du site, Fabrice roule en électrique la semaine et en hybride rechargeable le week-end. Après être passé par la case ingénierie chez des constructeurs et équipementiers outre-Rhin, il collabore régulièrement avec la rédaction et travaille au développement de la place de marché.



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