Pour Toyota, Volkswagen se trompe en misant tout sur la voiture électrique

Publié le 25 mars 2019 à 18h14 | Fabrice SPATH | 4 minutes

ANALYSE - Le leader mondial de la voiture hybride essence-électrique poursuit ses efforts pour promouvoir la technologie pile à combustible (hydrogène). Tout en investissant prudemment dans la voiture électrique dont le premier modèle sera lancé en Chine l’an prochain.


Tous les interlocuteurs Toyota Lexus rencontrés au gré des salons automobiles ou des événements presse répètent inlassablement à qui veut l’entendre : oui, le marché du véhicule électrique à batteries continuera de croître lors de la prochaine décennie mais sa part de marché à l’horizon 2030 ne devrait pas excéder 10 % des nouvelles immatriculations.

 

Priorité à l’hybride et à l’hydrogène

En attendant, le groupe nippon élargit sa gamme hybride dans le monde. Une stratégie gagnante en Europe où la firme de Nagoya a écoulé l’an passé plus de 60 % de ses ventes avec une motorisation essence-électrique.

Un ratio qui a permis à la filiale de réduire encore ses émissions de CO2 de 1,4 gramme par kilomètre (g/ km) parcouru, la moyenne s’établissant à 99,9 g / km. De quoi anticiper avec quiétude l’entrée en vigueur de la réglementation européenne qui sanctionnera à compter du 1er janvier 2021 les constructeurs qui ne respecteront pas la moyenne de 95 g / km.

Leader mondial de la double motorisation grâce aux quelque 13 millions de Prius, Auris, Yaris et autres Camry mis en circulation depuis 1997 - dont 2 millions rien qu’en Europe -, le groupe promeut également la voiture électrique équipée d’une pile à combustible, une technologie soutenue politiquement et financièrement par le Japon.

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La stratégie du tout-électrique « est une erreur »

Interrogé par le quotidien allemand Die Welt au sujet de la décision du groupe Volkswagen de parier quasi exclusivement sur l’électrique à batteries pour réduire ses émissions, Hisashi Nakai, porte-parole de Toyota, a confié :

« Nous pouvons comprendre qu’un [industriel] souhaite se concentrer sur une technologie » en particulier. « Mais nous pensons avoir besoin à la fois de [l’électrique à] batterie et de la pile à combustible. Ce n’est pas seulement une question de concurrence, mais aussi de protection du climat. »

Engagé dans une réduction drastique des émissions de CO2 de ses nouveaux modèles - 90 % entre 2010 et 2050 -, Toyota estime que la stratégie du tout-électrique « est une erreur ».

Et de préciser que plus de 7 000 Mirai à hydrogène ont déjà été commercialisées dans le monde depuis le lancement du modèle fin 2014. « Nous devons commencer par la pile à combustible maintenant, pas plus tard », a ainsi déclaré le porte-parole du groupe qui ambitionne de produire annuellement 30 000 exemplaires de la berline « zéro émission » dès l’an prochain.

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Maigres subventions et infrastructures publiques

Pour atteindre cet objectif, Toyota Lexus appelle les États à mettre la main au portefeuille, à l’instar de ce qui a déjà été fait pour les électriques. Au Japon où le gouvernement Abe subventionne à hauteur de 16 600 euros l’achat d’un modèle à hydrogène et de 1,5 million d’euros l’installation d’une station de distribution, la firme aux trois ellipses veut déployer une flotte conséquente de Mirai à l’occasion des Jeux Olympiques de 2020 qui se dérouleront à Tokyo.

Mais hormis le Japon et la Corée du Sud où le groupe Hyundai Motor nourrit l’ambition d’assembler 700 000 véhicules à pile à combustible d’ici 2030, rares sont les pays à vouloir investir dans l’avènement d’une société de l’hydrogène. Sur le Vieux Continent, seule l’Allemagne investit via un consortium privé dans un réseau de distribution tandis qu’en France, le service de taxis parisiens HYPE comptera 600 modèles Toyota et Hyundai dans sa flotte d’ici la fin 2020.

Contraint par la demande mais aussi par les quotas de vente mis en place en Chine et par une poignée d’États nord-américains - à l’image de la Californie et de l’Oregon aux États-Unis ou du Québec au Canada -, Toyota investit à son tour dans la voiture électrique à batteries. En produisant des cellules pour batteries avec son compatriote Panasonic d’abord, en commercialisant un premier modèle ensuite. Dès 2020, un C-HR Electric est attendu dans l’ex Empire du Milieu, avant de rejoindre l’Europe et les États-Unis l’année suivante.

Fabrice SPATH

Fabrice SPATH

Cofondateur du site, Fabrice roule en électrique la semaine et en hybride rechargeable le week-end. Après être passé par la case ingénierie chez des constructeurs et équipementiers outre-Rhin, il collabore régulièrement avec la rédaction et travaille au développement de la place de marché.

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